A 64 ans, Laurent Carenzo peut se vanter d’avoir vécu plusieurs vies. Il est interviewé par un journaliste de News of Marseille qui est allé interroger « le vieux matou » qui dirige la communication de la Chambre de Commerce depuis 7 ans.

L’interview:

 » Ce qui est pénible avec le métier de journaliste, c’est de cacher l’admiration qu’on peut nourrir à l’encontre d’une personne. Ce n’est pas “déontologique“. Quand on s’attaque à un portrait, il faut bien faire attention à peser les qualités et les défauts de l’homme  ou la femme que l’on a en face de soi. C’est la règle. Mais je hais les règles et j’apprécie plus que tout de les enfreindre avec la délectation du petit garçon qui plonge son doigt dans la confiture pendant que sa maman fait semblant d’ignorer la rapine dont elle est la victime consentante. Vous l’aurez donc compris : j’aime ce mec. Né dans un trou paumé de Dordogne en 1949 (j’ai noté le nom du village mais je ne vois pas l’intérêt de vous le communiquer vu qu’il a du disparaître derrière la végétation depuis la naissance du petiot Carenzo), Laurent se sent, surtout, de partout. Après une Maîtrise de Droit et un DES de Sciences Politiques à la Sorbonne, il fait des études de commerces à l’Européenne Business School qui ne lui a pas laissé de souvenirs émouvants.

 Sa vie est une suite de rencontres et d’opportunités qu’il sait saisir. Ce grand manipulateur présente son impressionnante carrière comme une enfilade de coups de chance. C’est Roland Thordain, un professeur qui lui dit un jour « toi, ton métier, c’est journaliste ». Et il devint journaliste. Stagiaire au Monde, il entre au Quotidien de Paris pour s’occuper d’économie. Il y reste 2 ans avant de partir aux Echos puis le Matin de Paris et Antenne 2 où il sera « grand reporter ». Là encore, Laurent a le succès modeste et il prend le temps de m’expliquer que ce titre ne lui avait été accordé qu’en raison d’une grille de salaires rigide. Il avait donc atterri, bien malgré lui, dans cette prestigieuse case qui lui permettra de crâner auprès de la gente féminine et d’obtenir des rabais  conséquents aux caisses du BHV.  Après Antenne 2, il se met à son compte et il monte sa société de production qui officiera pour la télé et les entreprises. En 1995, il arrête cette activité pour se consacrer aux métiers du conseil et de la formation. Parallèlement à cela, il fait la connaissance d’un homme qu’il va suivre et aider pendant plus de 10 ans : Bernard Tapie. Il le rencontre en 1980 et comme tout le monde, il est fasciné par le personnage de chef d’entreprise aux dents longues. A partir de 1985, il le conseille avec 3 autres disciples regroupés au sein d’un groupuscule auto-baptisé « Les Chieurs du Mardi ». Chaque semaine, ils se retrouvent autour de leur gourou pour lui soumettre des idées, le « driver » et le conduire à la Présidence de la République. C’est l’objectif affiché. Ils arriveront à le porter dans un Ministère avant que…

Laurent est fasciné mais exaspéré par Nanard. D’un coup, il n’y croit plus et celui qui était devenu son sherpa au Ministère de la Ville où il occupait très officiellement un poste de Chargé de Mission, démissionne. Juste avant que les « affaires » n’emportent le  destin du Commissaire Valence… De cette expérience ministérielle, Laurent en retire une subjugation pour la puissance de l’Etat. Il arrive à ne pas disjoncter mais reconnait à cette époque avoir un peu perdu de ses valeurs de gauche et avoir cédé au goût de  l’argent facile. En avouant cela, on ressent chez Laurent une sorte de honte sincère et une tâche morale sur un parcours irréprochable.

Après la période Tapie, il est tricard un peu partout à Marseille et c’est Pierre Lescure qui va lui tendre une belle perche salvatrice en l’accueillant au Groupe Canal + où il s’occupera de Télé Monte Carlo. Christophe Bouchet, éphémère Président de l’Olympique de Marseille l’appelle un jour pour lui proposer la direction de la communication de la prestigieuse équipe de football. Il accepte en négociant toutefois le droit de pouvoir continuer à coacher un de ses clients qu’il conseille depuis un moment, le PDG d’Orangina : Jacques Pfister. Bien lui en a pris et l’avenir lui donnera raison. Après 3 ans à l’OM, Pape Diouf réussit son coup d’état et fait débarquer toute l’équipe dirigeante.

 La première fois qu’il a rencontré Jacques Pfister c’était afin de préparer un interview pour France 3. Les 2 hommes qui continuent de se vouvoyer ne se quitteront plus et dès 1995, Laurent fixe un objectif ambitieux à son poulain : être un acteur du territoire et pourquoi pas la présidence de la CCI… En 2005, ils y arriveront et Jacques Pfister lui demande de prendre en main la communication qui croulait sous la poussière.

Aujourd’hui, Laurent accompagne le deuxième mandat de son Président qui vient d’être réélu et ce n’est pas le genre de truc qui fasse triper le félin. Il a limé ses crocs mais ce n’est pas pour cette raison qu’il va se contenter de laper du lait dans une  écuelle. Ceci dit, il attendra 2013 pour partir à la pêche. C’est qu’il l’a voulu sa « Capitale Européenne de la Culture » ! Il a mis tout son poids (qui peut être considérable, surtout après déjeuner) pour défendre la candidature de Marseille auprès de Jacques Pfister et  du monde économique. Après 2013, démarrera sa 7e vie qui sera tournée vraisemblablement vers les autres au travers un engagement associatif (il a beaucoup d’affection pour le Secours Populaire) ou bien l’écriture qui est une vieille passion encore vierge qu’il hésite à déflorer.

Quoiqu’il choisisse, il réussira et c’est sans doute cela qui est agaçant avec lui : il réussit à peu près tout ce qu’il entreprend à part les régimes alimentaires (ouf, j’ai réussi à être méchant dans la dernière ligne droite !) ».